22/03 15h00 - N 16°31 – W 22°48
Vent d’Est / Nord Est - 15 nœuds - Cap Est / Sud Est
Vitesse bateau 4 / 5 nœuds - 1 ris et Foc N°2 (très rapiécé) …
Et les trois mamelons (les petits volcans) de Sal s’estompent sur l’horizon. Grand beau, beau chaud, petit vent de travers – conditions super géniales pour le moment …
Je me dégage enfin de la languide baie de Palmeira de Sal la paresseuse (elle a bon dos, c’pas ?), du bel archipel du Cap Vert (paraît t’il, vu que je n’en ai rien vu, poil au – Chat !). Décollage en douceur tracté par Loïc et son « avione del mar ». Il sait bien, Loïc, les dangers de cette navigation sans moteur ... Merci l’ami, j’espère que l’on se reverra un jour … Pas de stress donc, manœuvre en toute sécurité … Malgré ses deux mois d’immersion, et après avoir été sollicitée par des vents de plus de 35 nœuds, je cueille mon ancre comme une fleur ! C’est ballot, pour une fois que j’avais un plongeur avec bouteilles sous le coude, bon on ne va pas se plaindre …
Reprise en main de l’Atao, remise en conscience de l’itinérance … Au début c’est toujours un peu la panique, le temps de caler les divers réglages : à hisser les voiles, à régler la barre et bout de ficelle, à s’éloigner de la côte et de ses quelques brisants, à arrimer et ranger le mouillage, à laver le pont encrassé du sable rouge de l’harmattan (et d’huile moteur, hum), à harnacher le chien de sa laisse de croisière, et déjà, à la cambuse pour une première petite bouffe …
Je contourne Sal par l’Ouest (une vingtaine de miles en 4h00), puis vire large cap au Sud – Sud Est, au 110, pour installer l’Atao sur un bord de près tribord, bord que, en théorie, je ne devrais pas quitter jusqu’à mon arrivée à Dakar, qui se trouve à environ 350 miles nautiques d’ici. Je vous rappelle que c’est censé être tranquille niveau manœuvre, la navigation hauturière …
Malgré ces conditions météo « pépère » je n’ose pas encore déployer toutes les ailes de l’Atao. Il faut tester la viabilité de ce gréement de fortune que j’ai eu tant de mal à installer et s’assurer que les coutures (et collages) de grand voile et de focs tiennent le choc … Donc deux ris, puis un ris dans la GV, je passe du foc N°1 au foc N°2 progressivement : prudence, calme et sérénité ! Je ne tirerais pas plus sur le mât pour aujourd’hui, chat échaudé en vaut deux … L’allure s’en ressent forcément, 4 à 5 nœuds de moyenne seulement. A ce rythme il me faudra bien 4 jours pour rejoindre Dakar. 4 jours pour 630 kilomètres en avançant 24h00 sur 24, faut être un peu frappadingue pour faire du bateau …
Et j’ai déjà ma « voie d’eau » qui me démange … Ces derniers jours au mouillage je pompais (électriquement) environ 120 litres par jour. Là, après à peine 6 heures de navigation, je viens d’évacuer près de 250 litres, hum… Et ces foutues de batteries que je viens de recharger à terre qui refusent déjà de faire fonctionner le pilote automatique, déjà quasi vides …
Welcome back on board my little Captain ...
Depuis mon dernier « radoub » à Lisbonne, il y a environ 6 mois, une épaisse couche d’algues et autres coquillages se sont développés sur la partie immergée de la coque. J’espérais qu’elle ferait office de calfatage « biologique », au moins le temps de joindre Dakar, ben mon cul oui … Ne reste qu’à espérer que je n’ai pas hérité de « tarets » en plus de tout, vous savez ce genre de termites des mers chaudes qui bouffent avec délectation le bon bois rouge des vieux « Yacht classiques ». On vérifiera ça à Dakar.
L’objectif là bas sera de trouver et d’installer un nouveau moteur, puis de sortir le bateau de l’eau pour le « radouber » correctement (boucher ces foutues voies d’eau, un rêve ..) et de remettre une bonne grosse couche d’antifouling (peinture sous marine fongicide) … Et ce sans disposer d’un premier sou, sans en posséder le quart des compétences nécessaires, et ceci le plus vite possible. Ca va être sport, Dakar !
23/03 10h30 - N 16°12 – W 21°17
Vent d’Est / Nord Est – 10 à 15 nœuds – Temps couvert Cap Est / Sud Est
Vitesse moyenne bateau 4 nœuds - 1 ris et Foc N°2 (c’est lent) …
Et voilà, premier jour (incluant une bonne et longue nuit) de navigation. A peine 110 miles parcourus, un peu moins de 5 nœuds de l’heure.
Ciel voilé, temps plombé, humidité !!!
A Sal, parmi d’autres séances de bricolage, j’ai tenté de recafalter « les hauts » de mon « bâtiment », d’améliorer l’étanchéité du pont. Une vingtaine d’heure de boulot et 3 cartouches de Sykaflex, mine de rien … Et bien, moralité, vous avez déjà pissé dans un violon (quelle est con c’t’ expression) ? En fait, je n’ai fait que déplacer les fuites de pont dans la cabine. A cette allure, au près, et vu la faible hauteur des œuvres mortes de l’Atao, le pont est trempé d’eau en quasi permanence par les embruns repoussés par le vent. De petites gouttes d’eau suintent désormais directement dans ma banette, ont osé inonder mon bon duvet, nuit salée, humide, noire, froide, longue …
La nuit, aux abords de la terre je me contrains à une veille de pont chaque demie heure. Bien que je n’ai encore croisé aucun autre navire, je suppose cette « route » entre Dakar et le Cap Vert très fréquentée par les cargos de fret ...
De plus, un ami plaisancier, ancien marin pécheur m’a judicieusement appris que les chalutiers et autres pécheurs professionnels ne lancent leur filets qu’avec moins de 500 mètres de fond. D’où la forte probabilité de les rencontrer, en activité, sur ces lieux là…
J’ai trouvé sa remarque excellente et depuis, avant les veilles de nuit, je cherche sur mes cartes et diverses instructions nautiques la probabilité de traverser des hauts fonds jusqu’à ce niveau d’eau, appelant une vigilance accrue ou non ... Mon sondeur électronique, limité en puissance, ne repère le fond qu’à partir de 100 mètres.
Ce matin temps plombé, pas de soleil, rien ne sèche …
Il faut de nouveau pomper les fonds de cales toutes les heures, flippant, stressant …
Ciré, je vais tenter de mettre le régulateur d’allure en route …
17h00 N16°04 – W 20°50 (+ ou – 30 mile en 6h30)
Il a failli fonctionner, cette saloperie de bordel de cul de pompe à merde de (retenez moi je vais commencer à être vulgaire) de régulateur d’allure. Pour la première fois depuis que je l’ai installé il a daigné maintenir un bord (au près – l’allure la plus équilibrée du bateau) pendant presque une demie heure … Il couinait un peu, à la bascule, toujours ce problème de pivot !!! Puis « Clanc » il s’est dessoudé d’un endroit totalement imprévu (la poulie du Fletner). Inaccessible, irréparable à bord, dégoût. Il va falloir tout démonter encore une fois, à terre, le ressouder, un autre chantier, d’autres frais … Et terminer la route en zig zag à l’élastique, à la barre mon Gilou ... Fait chier « la marine » ! Marre de ce matériel d’occasion.
J’étais tellement concentré sur les réglages de ce foutu truc cet après midi que j’en oubliais de veiller, j’ai failli m’emplafonner un cargo. Concentration… Vu la fréquentation maritime aux abords du port de commerce de Dakar il faut vraiment que je me concentre sur l’arrivée.
Mes batteries flirtent avec le 11 volts, elles sont quasi HS …
Par souci « d’économie d’énergie », il va donc falloir naviguer sans feux de route.
Du calcul de la consommation électrique : 3 ampoules à 10 Watt que divise 12 Volts multiplié par 8 heures de nuit = 24 ampères « bouffés ». Dépense inacceptable les amis.
Pour principale sécurité je me base sur le Radar en « mode veille » : Il s’enclenche 1 minute toutes les 20 minutes et balaie l’horizon sur 16 miles. Une alarme sonne si quelque chose entre dans son « champ de vision ». « Coût énergétique » par nuit environ de 4 ampères, ça va. Ce système de radar est vraiment efficace pour repérer les grosses embarcations (cargos, chalutiers), mais je l’ai déjà vu Zapper quelques voiliers de la taille de l’Atao, et toutes les annexes et autres pirogues de pêche sont complètement invisibles… Et désormais on arrive aux pays des pirogues, me semble t’il … Jusqu’où vont t’ils pêcher en mer ?
Et tiens ma biloute, à propos de sécurité, la petite cerise sur le Pancake, je viens de m’apercevoir que mon déflecteur radar qui était fixé aux haubans à disparu. Normal vu que le haubans lui même s’est arraché. Le déflecteur est une petite boite métallique toute simple, sans mécanisme aucun, étanche, qui réagit aux radars des cargos et me signalent à leur bonne attention ! Donc de nuit, pour eux, je suis désormais invisible sur l’eau. Brrr …
Pas à chier, va falloir veiller « grave », jusqu’à l’arrivée …
Et le baromètre compréhensif de chuter de deux points en deux heures, enfoiré !
Non je n’ai pas peur, car la peur est la petite mort, la peur tue l’esprit et …
Pompe Charlotte, pompe …
Un rayon de soleil cet après midi a séché mon duvet, yes …
Pas de volontaire sur la ligne de traîne.
Petite bouffe, petite sieste tant qu’il fait jour et que la météo le permet. Il faut répartir les périodes de récupération, « pfou pfou », le sportif ce Gilles …
Alleye, petit descriptif du repas ça intéresse tout le monde.
Au départ de Sal j’ai préparé à la cocote un succulent « Riz Criolou mode Gilou », façon esthétique pour définir une sorte de « bloubiboulga » composé de riz trop cuit, d’un kilo de filets de poisson corail (récupéré des pêches Loïciennes), haricots blancs et champignons de Paris. Bourratif en diable le truc … Je chauffe la marmite trois fois par jour. Plus de Canigou ni croquettes depuis un mois, Roxao adore le poisson. En complément de vivres : 6 œufs, margarine, trois tomates, café, lait concentré, pain – Nutella, quelques oignons, patates et ails et voilà pour la boustifaille…
Sinon, « on » se traîne toujours à un peu moins de 5 nœuds, avec foc N°2, un ris fainéant dans la grand voile + élastiques…
35O miles entre Sal et Dakar + 30 miles pour contourner Sal par l’Ouest et pour une approche prudente de Dakar à la voile + 20 miles pour cause de « errements à l’élastique » comptons 400 miles. Si je veux arriver après demain avant la nuit il faudrait que je gagne 1 ou 2 nœuds de moyenne … En déployant la grand voile ? J’aurais bien envoyé le Génois ce soir, pour la nuit, mais voilà, la chute du baromètre m’inquiète un peu. Bizarre, le temps reste clair, on vois les étoiles ce soir, le vent à baissé à moins de 10 nœuds en remontant en peu sur l’Est.
Que voulez vous ce sont les soucis du marin, la routine déjà ? Fatuité d’écritures, répétitions de circonstances … Si l’habitude d’écrire pouvait m’apprendre à sauver la sécheresse du fond (rigolo pour un marin). Et ces saloperies de noudoudiou de gouttes qui me tombent dans le cou !! Alleye Bonne nuit, de quart ...
24/03 10h30 (N 16°00 – W 19°36)
« Les risques de l’élastique » !! Le vent a viré franchement Nord / Nord Est vers trois heure du matin, l’Atao a suivi … Malgré mes veilles « anti collision » je n’ai pas remarqué le changement de Cap. Moralité, je me suis « perdu » de 6 miles dans le Nord, une heure trente à l’arrivée, je sens une nuit de Navigation supplémentaire se profiler ... Déjà fatigué, pas repris le rythme …
Sinon durant la nuit la manille de la drisse de foc a lâché, grimpette en haut du mât à prévoir ! Re hissé le foc dans le noir, avec la drisse de spi, à la main puisque pas de winche, mains en sang …
Bilan de la Nav’ d’hier ?
Ca ne va pas être brillant je le sens ! Environ 105 miles sur le Cap (4.4 nœuds à l’heure ?).
Depuis Sal N° 16°45 - W 22°59
Jour 1 N° 16°12 - W 21°17 Sud + 33 et Est + 102 = +/- 110 M
Jour 2 N° 16°00 - W 19°36 Sud + 12 et Est + 101 = +/- 105 M
Dakar N° 14°41 - W 21°17 Sud - 79 et Est - 131
= 160 miles jusqu’à Dakar
25/03 03H00 du matin (N 15°35 – W 18°20)
Chier, chier, chier … Le radar vient de rendre l’âme, enfin son âme électrique, enfin n’y’a plus assez d’intensité dans les batteries pour qu’il fonctionne. Justement, juste là aux abords du port de Dakar …
Croisé deux cargos aujourd’hui :
Le premier est passé a à peine ½ mile sur mon tribord, par l’arrière c’est le plus énervant, il suivait une route quasi identique à la mienne, difficile d’estimer correctement sa trajectoire d’autant que la mienne est relativement aléatoire avec le vent, les élastiques … Il a fini par passer sans dégâts.
Le second était un bon grand, gros, gras, énorme pétrolier. Il m’a croisé par le bâbord à quelques encablures sur l’avant … Masse ! Impressionnante structure d’acier et de lumière (au moins 50 projo sur le pont), ils n’ont pas de « petits soucis » d’énergie, eux, au moins …
Bref me voici déjà quasi « aux fraises » niveau Jus … Pourtant ce n’est pas faute d’avoir économisé : Pas de pilote automatique, pas de feux de nuit … Ma quasi seule « débauche » est l’ampoule du plafonnier de la cabine la nuit, le radar en mode veille, le GPS sur l’allume cigare … What to do ?
Le générateur que j’ai récupéré au Cap Vert fonctionne 5 minutes et s’éteint, s’étouffe rapidement. Il faisait parti du naufrage de Loïc, il est ensablé et salé aux connectiques, il faudra que je le donne « à réviser » à Dakar, mes interventions personnelles paraissant relativement inefficace (démontage filtre à air, nettoyage du carbu …).
Les pompes de cales (toujours 120 litres toutes les heures) fonctionnent sur l’ex batteries du moteur (enfin sur les batteries de mon ex moteur, je me comprends hum !). J’espère que au moins « ça » va tenir jusqu’à Dakar, sinon à moi les 20 seaux à la mano de l’heure …
L’arrivée ?? Je suis donc en ce moment à environ 73 miles de Dakar en ligne droite. Avec ce vent et cette mer, je ne maintiens un cap stable (sans tenir la barre) que plein Est, et nous avons déjà un peu trop dérivé au Nord. Impossible d’abattre plus au vent sous risque d’empanner brutalement, je ne veux pas prendre ce risque, avec mes haubans bricolés …
Je fonce donc plein Est de nuit à 5 nœuds de moyenne, nous sommes à 30 miles des côtes africaines, droit sur le Cap des Almadies en fait … Dans les préconisations d’approche entendues au Cap Vert « on » m’a bien prévenu :
« surtout tu évites le Cap des Almadies, beaucoup de hauts fonds vicieux, c’est un mouroir à cargo truffé d’épaves vicelardes, c’est également route maritime commerciale très très fréquentée, 90 % du trafic maritime de Dakar remonte plutôt vers le Nord, vers le Bizness, donc prudence … Contourne bien large, par le Sud, c’est plus tranquille. ».
Et ben moi « kécekejefous » ce soir, je fonce droit sur ce putain de Cap cimetière de bateaux, sans feux, sans radar, sans déflecteur, et avec une envie de dormir du tonnerre de Brest …
Grand fou d’aventurier va ! (Self promotion). Bon en fait c’est encore vachement loin 30 miles et, si mes calculs sont bons, d’ici le petit matin, il me reste du temps pour virer au sud. Là il faudra finir la route barre en main, de jour. Juste il ne faut pas que je m’offre « une panne de réveil », là les conséquences pourraient être fatales, nuit inquiète en perspective tout de même …
C’est con cette histoire d’Est forcé parce que « mathématiquement » (j’ai calculé en faisant un dessin sur papier quadrillé et une règle graduée – gros balourd qui ne sais même pas poser un calcul aussi simple – ah si j’avais pas raté l’école ..) mathématiquement donc toutes les heures désormais j’augmente de 10 % la distance cap à parcourir, si vous voyez ce que je veux dire … A l’estime arrivée demain vers 17H00 face à l’île de Gorée ? Pas bon ça, le coucher de soleil dans le nez en plus 3H00 plus tard … La « hanse Hann », mon objectif à Dakar est elle aussi truffée d’épave, m’a t’on dit, arrivée de jour préférable.
Bref, avec ou sans électricité, avec ou sans sondeur, avec ou sans seaux d’eau, avec ou sans collision, avec ou sans poisson ? C’est ce que vous saurez si vous poursuivez les aventures de … Captaingils !!!
26/03 10H30 (N 15°25 – W 17°48)
A environ 50 miles de Dakar, trop au nord …
Le vent est tombé, 2 ou 3 nœuds de moyenne à c’t’heure, toujours cette appréhension de la côte sans moteur, gros courant, sans vent... A la barre depuis 6h00 du Mat’ plein Sud, et il faut que je m’y colle pour la journée, pas le choix …
16h50 cales vidées, 17h35 elles sont pleines de nouveau, moins d’une heure, quelques minutes !!! Alors que quasi pas de vent ! Putain ça s’aggrave ! Marre de ce plan d’amateur inconséquent ... Manque 5000 € pour équiper ce foutu rafiot correctement, contre ma vie ??
19h00 Le Cap des Almadies est juste en vue, je décide pourtant de continuer plein Est, pour me planquer « à la Cape » pour la nuit à l’abri au nord du Cap, loin des cargos qui défilent sur un axe Nord Sud. Je suis à peine manœuvrant avec ce mini vent, pas le moment de jouer au Kakou et de tenter de louvoyer parmi ces monstres qui se déplacent à plus de 20 nœuds de l’heure. Crevé …
• Aujourd’hui 13h00 de présence à la barre franche pour avancer d’à peine 30 miles
• Plus de gaz, quel con, je peux même plus faire de café, boite de conserve froide
• Guerroyé avec le générateur pendant deux heures – j’ai perdu une bataille ..
• Etude de ma dérive en fuite pure (toutes voiles abattues)
19h15 N14°59°137 W17°35°639
20h15 N14°59°141 W17°36°242
Soit 0.07 nord et 0.7 sud – euh ça devrait passer …
• Bilan ? La mer pardonne aux charlatans
• A dormir fragmenté, haché, fâché, fatigué, énervé
• Et les Chaddock pompaient pompaient, c’est plus un bateau se rafiot, c’est une passoire …
27/03 06H00 du matin (N 15°35 – W 18°20)
Pas de Café … Grr !!! Pain nutella et ça ira !!!
Tout de même en dix heures sans voile dérivé 1,5 miles au Sud et 6,5 miles à l’Ouest. Chouette c’est favorable pour une fois, je me suis dégagé du Cap des Almadies et bien repositionné par rapport au vent … Petite navigation de 20 à 25 miles et je suis arrivé.
Je passe ce foutu Cap vers 10h00, joli et rigolo, de jour, avec des conditions météo clémentes … Pour le coup, je le frôle à moins d’un mile, pour voir les épaves, au loin l’île de Ngor se profile. Gros coup de courant d’un coup sur un demi mile, beaucoup d’eau reflue là, mer soudainement très formée, qu’est ce que ça doit être par mauvais temps. Des dizaines de pirogues de pécheurs à cet endroit qui pêchent en plein dans ce flux qui doit être particulièrement riche en poisson . Phare de la presque île du Cap vert repéré, les faubourgs de Dakar, le quartier résidentiel des Almadies, puis premiers building … Il faut passer à l’ouest de l’île des Madeleines (dite également l’île au serpent), à son Est c’est une Zone marine militaire interdite via les instructions nautiques … Respectons, respectons … Le Cap Manuel défile, me découvrant la célébrissime île de Gorée …
J’adore faire du bateau ce matin, trop top classe d’être ici.
Puis d’un coup le vent se lève bien fort, bien vite, juste prés des côtes bien entendu (20 puis 25 nœuds), effet venturi ? Ou grain à venir.
Derniers miles un peu tendu, je ne sais pas exactement où se trouve cette foutue hanse Hann, c’est grand ici, courant tournant, vent forcissant, le soleil est désormais sur la côte et m’aveugle à moitié, une sorte de brume recouvre les amers de la côte, je n’ai pas les coordonnées GPS précises de la petite centaine de mètre de plage où se concentrent les voiliers, je tourne en rond presque tout l’après midi, longeant la côte …
Enfin j’aperçois un mât, puis deux, puis trois, soulagement, le vent forci toujours. Approche au près pas évident, je prépare le mouillage et me rapproche en douceur. Je me décide enfin pour une place un peu éloignée, mais sûre si l’ancre dérape … Au moment de jeter l’ancre une annexe s’approche. C’est le passeur du CVD (Cercle de Voile de Dakar) il me dit que je suis trop loin, trop profond surtout avec ce vent, qui va empirer dans les jours à venir paraît t’il … Je lui explique mon problème de moteur, que je n’ai pas envie de louvoyer entre tous ces bateaux avec ce vent. Pas de problème, il me demande une aussière et me tracte vers une place mieux protégée …
Toujours aussi jouissif le « CRR CRR CRR » de la chaîne du mouillage.
Dakar, putain j’y suis, un peu plus de deux ans après avoir décidé de me former aux choses de la marine et d’acheter un foutu rafiot. Petite larme, de bonheur, je crois bien …
Vent d’Est / Nord Est - 15 nœuds - Cap Est / Sud Est
Vitesse bateau 4 / 5 nœuds - 1 ris et Foc N°2 (très rapiécé) …
Et les trois mamelons (les petits volcans) de Sal s’estompent sur l’horizon. Grand beau, beau chaud, petit vent de travers – conditions super géniales pour le moment …
Je me dégage enfin de la languide baie de Palmeira de Sal la paresseuse (elle a bon dos, c’pas ?), du bel archipel du Cap Vert (paraît t’il, vu que je n’en ai rien vu, poil au – Chat !). Décollage en douceur tracté par Loïc et son « avione del mar ». Il sait bien, Loïc, les dangers de cette navigation sans moteur ... Merci l’ami, j’espère que l’on se reverra un jour … Pas de stress donc, manœuvre en toute sécurité … Malgré ses deux mois d’immersion, et après avoir été sollicitée par des vents de plus de 35 nœuds, je cueille mon ancre comme une fleur ! C’est ballot, pour une fois que j’avais un plongeur avec bouteilles sous le coude, bon on ne va pas se plaindre …
Reprise en main de l’Atao, remise en conscience de l’itinérance … Au début c’est toujours un peu la panique, le temps de caler les divers réglages : à hisser les voiles, à régler la barre et bout de ficelle, à s’éloigner de la côte et de ses quelques brisants, à arrimer et ranger le mouillage, à laver le pont encrassé du sable rouge de l’harmattan (et d’huile moteur, hum), à harnacher le chien de sa laisse de croisière, et déjà, à la cambuse pour une première petite bouffe …
Je contourne Sal par l’Ouest (une vingtaine de miles en 4h00), puis vire large cap au Sud – Sud Est, au 110, pour installer l’Atao sur un bord de près tribord, bord que, en théorie, je ne devrais pas quitter jusqu’à mon arrivée à Dakar, qui se trouve à environ 350 miles nautiques d’ici. Je vous rappelle que c’est censé être tranquille niveau manœuvre, la navigation hauturière …
Malgré ces conditions météo « pépère » je n’ose pas encore déployer toutes les ailes de l’Atao. Il faut tester la viabilité de ce gréement de fortune que j’ai eu tant de mal à installer et s’assurer que les coutures (et collages) de grand voile et de focs tiennent le choc … Donc deux ris, puis un ris dans la GV, je passe du foc N°1 au foc N°2 progressivement : prudence, calme et sérénité ! Je ne tirerais pas plus sur le mât pour aujourd’hui, chat échaudé en vaut deux … L’allure s’en ressent forcément, 4 à 5 nœuds de moyenne seulement. A ce rythme il me faudra bien 4 jours pour rejoindre Dakar. 4 jours pour 630 kilomètres en avançant 24h00 sur 24, faut être un peu frappadingue pour faire du bateau …
Et j’ai déjà ma « voie d’eau » qui me démange … Ces derniers jours au mouillage je pompais (électriquement) environ 120 litres par jour. Là, après à peine 6 heures de navigation, je viens d’évacuer près de 250 litres, hum… Et ces foutues de batteries que je viens de recharger à terre qui refusent déjà de faire fonctionner le pilote automatique, déjà quasi vides …
Welcome back on board my little Captain ...
Depuis mon dernier « radoub » à Lisbonne, il y a environ 6 mois, une épaisse couche d’algues et autres coquillages se sont développés sur la partie immergée de la coque. J’espérais qu’elle ferait office de calfatage « biologique », au moins le temps de joindre Dakar, ben mon cul oui … Ne reste qu’à espérer que je n’ai pas hérité de « tarets » en plus de tout, vous savez ce genre de termites des mers chaudes qui bouffent avec délectation le bon bois rouge des vieux « Yacht classiques ». On vérifiera ça à Dakar.
L’objectif là bas sera de trouver et d’installer un nouveau moteur, puis de sortir le bateau de l’eau pour le « radouber » correctement (boucher ces foutues voies d’eau, un rêve ..) et de remettre une bonne grosse couche d’antifouling (peinture sous marine fongicide) … Et ce sans disposer d’un premier sou, sans en posséder le quart des compétences nécessaires, et ceci le plus vite possible. Ca va être sport, Dakar !
23/03 10h30 - N 16°12 – W 21°17
Vent d’Est / Nord Est – 10 à 15 nœuds – Temps couvert Cap Est / Sud Est
Vitesse moyenne bateau 4 nœuds - 1 ris et Foc N°2 (c’est lent) …
Et voilà, premier jour (incluant une bonne et longue nuit) de navigation. A peine 110 miles parcourus, un peu moins de 5 nœuds de l’heure.
Ciel voilé, temps plombé, humidité !!!
A Sal, parmi d’autres séances de bricolage, j’ai tenté de recafalter « les hauts » de mon « bâtiment », d’améliorer l’étanchéité du pont. Une vingtaine d’heure de boulot et 3 cartouches de Sykaflex, mine de rien … Et bien, moralité, vous avez déjà pissé dans un violon (quelle est con c’t’ expression) ? En fait, je n’ai fait que déplacer les fuites de pont dans la cabine. A cette allure, au près, et vu la faible hauteur des œuvres mortes de l’Atao, le pont est trempé d’eau en quasi permanence par les embruns repoussés par le vent. De petites gouttes d’eau suintent désormais directement dans ma banette, ont osé inonder mon bon duvet, nuit salée, humide, noire, froide, longue …
La nuit, aux abords de la terre je me contrains à une veille de pont chaque demie heure. Bien que je n’ai encore croisé aucun autre navire, je suppose cette « route » entre Dakar et le Cap Vert très fréquentée par les cargos de fret ...
De plus, un ami plaisancier, ancien marin pécheur m’a judicieusement appris que les chalutiers et autres pécheurs professionnels ne lancent leur filets qu’avec moins de 500 mètres de fond. D’où la forte probabilité de les rencontrer, en activité, sur ces lieux là…
J’ai trouvé sa remarque excellente et depuis, avant les veilles de nuit, je cherche sur mes cartes et diverses instructions nautiques la probabilité de traverser des hauts fonds jusqu’à ce niveau d’eau, appelant une vigilance accrue ou non ... Mon sondeur électronique, limité en puissance, ne repère le fond qu’à partir de 100 mètres.
Ce matin temps plombé, pas de soleil, rien ne sèche …
Il faut de nouveau pomper les fonds de cales toutes les heures, flippant, stressant …
Ciré, je vais tenter de mettre le régulateur d’allure en route …
17h00 N16°04 – W 20°50 (+ ou – 30 mile en 6h30)
Il a failli fonctionner, cette saloperie de bordel de cul de pompe à merde de (retenez moi je vais commencer à être vulgaire) de régulateur d’allure. Pour la première fois depuis que je l’ai installé il a daigné maintenir un bord (au près – l’allure la plus équilibrée du bateau) pendant presque une demie heure … Il couinait un peu, à la bascule, toujours ce problème de pivot !!! Puis « Clanc » il s’est dessoudé d’un endroit totalement imprévu (la poulie du Fletner). Inaccessible, irréparable à bord, dégoût. Il va falloir tout démonter encore une fois, à terre, le ressouder, un autre chantier, d’autres frais … Et terminer la route en zig zag à l’élastique, à la barre mon Gilou ... Fait chier « la marine » ! Marre de ce matériel d’occasion.
J’étais tellement concentré sur les réglages de ce foutu truc cet après midi que j’en oubliais de veiller, j’ai failli m’emplafonner un cargo. Concentration… Vu la fréquentation maritime aux abords du port de commerce de Dakar il faut vraiment que je me concentre sur l’arrivée.
Mes batteries flirtent avec le 11 volts, elles sont quasi HS …
Par souci « d’économie d’énergie », il va donc falloir naviguer sans feux de route.
Du calcul de la consommation électrique : 3 ampoules à 10 Watt que divise 12 Volts multiplié par 8 heures de nuit = 24 ampères « bouffés ». Dépense inacceptable les amis.
Pour principale sécurité je me base sur le Radar en « mode veille » : Il s’enclenche 1 minute toutes les 20 minutes et balaie l’horizon sur 16 miles. Une alarme sonne si quelque chose entre dans son « champ de vision ». « Coût énergétique » par nuit environ de 4 ampères, ça va. Ce système de radar est vraiment efficace pour repérer les grosses embarcations (cargos, chalutiers), mais je l’ai déjà vu Zapper quelques voiliers de la taille de l’Atao, et toutes les annexes et autres pirogues de pêche sont complètement invisibles… Et désormais on arrive aux pays des pirogues, me semble t’il … Jusqu’où vont t’ils pêcher en mer ?
Et tiens ma biloute, à propos de sécurité, la petite cerise sur le Pancake, je viens de m’apercevoir que mon déflecteur radar qui était fixé aux haubans à disparu. Normal vu que le haubans lui même s’est arraché. Le déflecteur est une petite boite métallique toute simple, sans mécanisme aucun, étanche, qui réagit aux radars des cargos et me signalent à leur bonne attention ! Donc de nuit, pour eux, je suis désormais invisible sur l’eau. Brrr …
Pas à chier, va falloir veiller « grave », jusqu’à l’arrivée …
Et le baromètre compréhensif de chuter de deux points en deux heures, enfoiré !
Non je n’ai pas peur, car la peur est la petite mort, la peur tue l’esprit et …
Pompe Charlotte, pompe …
Un rayon de soleil cet après midi a séché mon duvet, yes …
Pas de volontaire sur la ligne de traîne.
Petite bouffe, petite sieste tant qu’il fait jour et que la météo le permet. Il faut répartir les périodes de récupération, « pfou pfou », le sportif ce Gilles …
Alleye, petit descriptif du repas ça intéresse tout le monde.
Au départ de Sal j’ai préparé à la cocote un succulent « Riz Criolou mode Gilou », façon esthétique pour définir une sorte de « bloubiboulga » composé de riz trop cuit, d’un kilo de filets de poisson corail (récupéré des pêches Loïciennes), haricots blancs et champignons de Paris. Bourratif en diable le truc … Je chauffe la marmite trois fois par jour. Plus de Canigou ni croquettes depuis un mois, Roxao adore le poisson. En complément de vivres : 6 œufs, margarine, trois tomates, café, lait concentré, pain – Nutella, quelques oignons, patates et ails et voilà pour la boustifaille…
Sinon, « on » se traîne toujours à un peu moins de 5 nœuds, avec foc N°2, un ris fainéant dans la grand voile + élastiques…
35O miles entre Sal et Dakar + 30 miles pour contourner Sal par l’Ouest et pour une approche prudente de Dakar à la voile + 20 miles pour cause de « errements à l’élastique » comptons 400 miles. Si je veux arriver après demain avant la nuit il faudrait que je gagne 1 ou 2 nœuds de moyenne … En déployant la grand voile ? J’aurais bien envoyé le Génois ce soir, pour la nuit, mais voilà, la chute du baromètre m’inquiète un peu. Bizarre, le temps reste clair, on vois les étoiles ce soir, le vent à baissé à moins de 10 nœuds en remontant en peu sur l’Est.
Que voulez vous ce sont les soucis du marin, la routine déjà ? Fatuité d’écritures, répétitions de circonstances … Si l’habitude d’écrire pouvait m’apprendre à sauver la sécheresse du fond (rigolo pour un marin). Et ces saloperies de noudoudiou de gouttes qui me tombent dans le cou !! Alleye Bonne nuit, de quart ...
24/03 10h30 (N 16°00 – W 19°36)
« Les risques de l’élastique » !! Le vent a viré franchement Nord / Nord Est vers trois heure du matin, l’Atao a suivi … Malgré mes veilles « anti collision » je n’ai pas remarqué le changement de Cap. Moralité, je me suis « perdu » de 6 miles dans le Nord, une heure trente à l’arrivée, je sens une nuit de Navigation supplémentaire se profiler ... Déjà fatigué, pas repris le rythme …
Sinon durant la nuit la manille de la drisse de foc a lâché, grimpette en haut du mât à prévoir ! Re hissé le foc dans le noir, avec la drisse de spi, à la main puisque pas de winche, mains en sang …
Bilan de la Nav’ d’hier ?
Ca ne va pas être brillant je le sens ! Environ 105 miles sur le Cap (4.4 nœuds à l’heure ?).
Depuis Sal N° 16°45 - W 22°59
Jour 1 N° 16°12 - W 21°17 Sud + 33 et Est + 102 = +/- 110 M
Jour 2 N° 16°00 - W 19°36 Sud + 12 et Est + 101 = +/- 105 M
Dakar N° 14°41 - W 21°17 Sud - 79 et Est - 131
= 160 miles jusqu’à Dakar
25/03 03H00 du matin (N 15°35 – W 18°20)
Chier, chier, chier … Le radar vient de rendre l’âme, enfin son âme électrique, enfin n’y’a plus assez d’intensité dans les batteries pour qu’il fonctionne. Justement, juste là aux abords du port de Dakar …
Croisé deux cargos aujourd’hui :
Le premier est passé a à peine ½ mile sur mon tribord, par l’arrière c’est le plus énervant, il suivait une route quasi identique à la mienne, difficile d’estimer correctement sa trajectoire d’autant que la mienne est relativement aléatoire avec le vent, les élastiques … Il a fini par passer sans dégâts.
Le second était un bon grand, gros, gras, énorme pétrolier. Il m’a croisé par le bâbord à quelques encablures sur l’avant … Masse ! Impressionnante structure d’acier et de lumière (au moins 50 projo sur le pont), ils n’ont pas de « petits soucis » d’énergie, eux, au moins …
Bref me voici déjà quasi « aux fraises » niveau Jus … Pourtant ce n’est pas faute d’avoir économisé : Pas de pilote automatique, pas de feux de nuit … Ma quasi seule « débauche » est l’ampoule du plafonnier de la cabine la nuit, le radar en mode veille, le GPS sur l’allume cigare … What to do ?
Le générateur que j’ai récupéré au Cap Vert fonctionne 5 minutes et s’éteint, s’étouffe rapidement. Il faisait parti du naufrage de Loïc, il est ensablé et salé aux connectiques, il faudra que je le donne « à réviser » à Dakar, mes interventions personnelles paraissant relativement inefficace (démontage filtre à air, nettoyage du carbu …).
Les pompes de cales (toujours 120 litres toutes les heures) fonctionnent sur l’ex batteries du moteur (enfin sur les batteries de mon ex moteur, je me comprends hum !). J’espère que au moins « ça » va tenir jusqu’à Dakar, sinon à moi les 20 seaux à la mano de l’heure …
L’arrivée ?? Je suis donc en ce moment à environ 73 miles de Dakar en ligne droite. Avec ce vent et cette mer, je ne maintiens un cap stable (sans tenir la barre) que plein Est, et nous avons déjà un peu trop dérivé au Nord. Impossible d’abattre plus au vent sous risque d’empanner brutalement, je ne veux pas prendre ce risque, avec mes haubans bricolés …
Je fonce donc plein Est de nuit à 5 nœuds de moyenne, nous sommes à 30 miles des côtes africaines, droit sur le Cap des Almadies en fait … Dans les préconisations d’approche entendues au Cap Vert « on » m’a bien prévenu :
« surtout tu évites le Cap des Almadies, beaucoup de hauts fonds vicieux, c’est un mouroir à cargo truffé d’épaves vicelardes, c’est également route maritime commerciale très très fréquentée, 90 % du trafic maritime de Dakar remonte plutôt vers le Nord, vers le Bizness, donc prudence … Contourne bien large, par le Sud, c’est plus tranquille. ».
Et ben moi « kécekejefous » ce soir, je fonce droit sur ce putain de Cap cimetière de bateaux, sans feux, sans radar, sans déflecteur, et avec une envie de dormir du tonnerre de Brest …
Grand fou d’aventurier va ! (Self promotion). Bon en fait c’est encore vachement loin 30 miles et, si mes calculs sont bons, d’ici le petit matin, il me reste du temps pour virer au sud. Là il faudra finir la route barre en main, de jour. Juste il ne faut pas que je m’offre « une panne de réveil », là les conséquences pourraient être fatales, nuit inquiète en perspective tout de même …
C’est con cette histoire d’Est forcé parce que « mathématiquement » (j’ai calculé en faisant un dessin sur papier quadrillé et une règle graduée – gros balourd qui ne sais même pas poser un calcul aussi simple – ah si j’avais pas raté l’école ..) mathématiquement donc toutes les heures désormais j’augmente de 10 % la distance cap à parcourir, si vous voyez ce que je veux dire … A l’estime arrivée demain vers 17H00 face à l’île de Gorée ? Pas bon ça, le coucher de soleil dans le nez en plus 3H00 plus tard … La « hanse Hann », mon objectif à Dakar est elle aussi truffée d’épave, m’a t’on dit, arrivée de jour préférable.
Bref, avec ou sans électricité, avec ou sans sondeur, avec ou sans seaux d’eau, avec ou sans collision, avec ou sans poisson ? C’est ce que vous saurez si vous poursuivez les aventures de … Captaingils !!!
26/03 10H30 (N 15°25 – W 17°48)
A environ 50 miles de Dakar, trop au nord …
Le vent est tombé, 2 ou 3 nœuds de moyenne à c’t’heure, toujours cette appréhension de la côte sans moteur, gros courant, sans vent... A la barre depuis 6h00 du Mat’ plein Sud, et il faut que je m’y colle pour la journée, pas le choix …
16h50 cales vidées, 17h35 elles sont pleines de nouveau, moins d’une heure, quelques minutes !!! Alors que quasi pas de vent ! Putain ça s’aggrave ! Marre de ce plan d’amateur inconséquent ... Manque 5000 € pour équiper ce foutu rafiot correctement, contre ma vie ??
19h00 Le Cap des Almadies est juste en vue, je décide pourtant de continuer plein Est, pour me planquer « à la Cape » pour la nuit à l’abri au nord du Cap, loin des cargos qui défilent sur un axe Nord Sud. Je suis à peine manœuvrant avec ce mini vent, pas le moment de jouer au Kakou et de tenter de louvoyer parmi ces monstres qui se déplacent à plus de 20 nœuds de l’heure. Crevé …
• Aujourd’hui 13h00 de présence à la barre franche pour avancer d’à peine 30 miles
• Plus de gaz, quel con, je peux même plus faire de café, boite de conserve froide
• Guerroyé avec le générateur pendant deux heures – j’ai perdu une bataille ..
• Etude de ma dérive en fuite pure (toutes voiles abattues)
19h15 N14°59°137 W17°35°639
20h15 N14°59°141 W17°36°242
Soit 0.07 nord et 0.7 sud – euh ça devrait passer …
• Bilan ? La mer pardonne aux charlatans
• A dormir fragmenté, haché, fâché, fatigué, énervé
• Et les Chaddock pompaient pompaient, c’est plus un bateau se rafiot, c’est une passoire …
27/03 06H00 du matin (N 15°35 – W 18°20)
Pas de Café … Grr !!! Pain nutella et ça ira !!!
Tout de même en dix heures sans voile dérivé 1,5 miles au Sud et 6,5 miles à l’Ouest. Chouette c’est favorable pour une fois, je me suis dégagé du Cap des Almadies et bien repositionné par rapport au vent … Petite navigation de 20 à 25 miles et je suis arrivé.
Je passe ce foutu Cap vers 10h00, joli et rigolo, de jour, avec des conditions météo clémentes … Pour le coup, je le frôle à moins d’un mile, pour voir les épaves, au loin l’île de Ngor se profile. Gros coup de courant d’un coup sur un demi mile, beaucoup d’eau reflue là, mer soudainement très formée, qu’est ce que ça doit être par mauvais temps. Des dizaines de pirogues de pécheurs à cet endroit qui pêchent en plein dans ce flux qui doit être particulièrement riche en poisson . Phare de la presque île du Cap vert repéré, les faubourgs de Dakar, le quartier résidentiel des Almadies, puis premiers building … Il faut passer à l’ouest de l’île des Madeleines (dite également l’île au serpent), à son Est c’est une Zone marine militaire interdite via les instructions nautiques … Respectons, respectons … Le Cap Manuel défile, me découvrant la célébrissime île de Gorée …
J’adore faire du bateau ce matin, trop top classe d’être ici.
Puis d’un coup le vent se lève bien fort, bien vite, juste prés des côtes bien entendu (20 puis 25 nœuds), effet venturi ? Ou grain à venir.
Derniers miles un peu tendu, je ne sais pas exactement où se trouve cette foutue hanse Hann, c’est grand ici, courant tournant, vent forcissant, le soleil est désormais sur la côte et m’aveugle à moitié, une sorte de brume recouvre les amers de la côte, je n’ai pas les coordonnées GPS précises de la petite centaine de mètre de plage où se concentrent les voiliers, je tourne en rond presque tout l’après midi, longeant la côte …
Enfin j’aperçois un mât, puis deux, puis trois, soulagement, le vent forci toujours. Approche au près pas évident, je prépare le mouillage et me rapproche en douceur. Je me décide enfin pour une place un peu éloignée, mais sûre si l’ancre dérape … Au moment de jeter l’ancre une annexe s’approche. C’est le passeur du CVD (Cercle de Voile de Dakar) il me dit que je suis trop loin, trop profond surtout avec ce vent, qui va empirer dans les jours à venir paraît t’il … Je lui explique mon problème de moteur, que je n’ai pas envie de louvoyer entre tous ces bateaux avec ce vent. Pas de problème, il me demande une aussière et me tracte vers une place mieux protégée …
Toujours aussi jouissif le « CRR CRR CRR » de la chaîne du mouillage.
Dakar, putain j’y suis, un peu plus de deux ans après avoir décidé de me former aux choses de la marine et d’acheter un foutu rafiot. Petite larme, de bonheur, je crois bien …
1 commentaire:
Hm hm.. that's interessting but actually i have a hard time determining it... wonder what others have to say..
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